Page 1
Page 2
Photos |
Interview - Page 1
NB : Personne ne sait
pourquoi nous devons garder les bras le long du corps en danse
irlandaise. Avez-vous une id�e du pourquoi ?
TN : Malheureusement, vous devez danser
ainsi en comp�tition.� Ce sont les r�gles.� Si vous
participez� � un "feis" (comp�tition de danse) ou
n'importe quel championnat partout dans le monde, vous devez garder les
bras le long du corps, les mains ferm�es en poing. C'est ainsi mais �a
ne l'a pas toujours �t�.� A l'�poque, je parle de si�cles
pass�, les danseurs �taient beaucoup plus libres, les bras
balan�aient dans tous les sens.� Mais encore une fois, si vous
faites de la comp�tition, vous �tes oblig�s de respecter les r�gles,
de garder les bras le long du corps, de garder le torse immobile.
NB : On entend de plus en plus souvent parler de danse irlandaise progressive en
plus de la danse irlandaise traditionnelle.� Pensez-vous que, dans
un futur proche, on pourrait voir appara�tre une nouvelle cat�gorie au
championnat du Monde pour ceux et celles qui souhaitent danser avec des
mouvements de bras ?
TN : Oh non, certainement pas dans un futur
proche !NB :
Les gar�ons ont maintenant le droit de choisir entre le kilt et le
pantalon.� Est-ce qu'il y aura �galement du changement pour les
tenues des filles ?
TN : Les gar�ons ont toujours eu le
droit de porter le pantalon.� Personnellement quand je dansais,
j'avoues que je d�testais le kilt.� C'�tait pas facile �
l'�cole, il fallait toujours se d�fendre contre les autres gar�ons
qui me nommaient� "sissy" (homme eff�min�). J'ai
d�test� le kilt avec passion.� De nos jours, on pense que vous devez
porter le kilt, mais ce n'est pas vrai, vous n'�tes pas oblig�s.�
Ce sont surtout les professeurs et les parents qui vous disent ce genre de
choses, pour respecter la tradition.
NB : Pas beaucoup de gens savent que
le kilt n'est pas obligatoire.� Comme la plupart, j'ai cru que
c'�tait gr�ce � Michael Flatley et gr�ce au succ�s de spectacles
comme Riverdance et Lord of the Dance que les choses ont boug�.
TN : Je crois qu'il y a de �a,
maintenant de plus en plus de gar�ons osent porter le pantalon.�
Mais, vous savez, beaucoup pr�f�rent porter le kilt. Ceci dit, si vous
avez les jambes arqu�es, les genoux ca�eux, les jambes tordues,
couvrez-les avec le pantalon ! Avec le kilt, ces d�fauts sont voyants,
vous essayez de les cachez en dansant de profil, jamais face � la sc�ne,
avec le pantalon ces supercheries ne sont plus n�cessaires.�
NB : Qu'en est-il pour les filles?�
Les robes traditionnelles tr�s color�es, les cheveux boucl�s, le port
de couronne, les "poodle socks" (genre de chaussettes
blanches).� Est-ce qu'il y a des r�gles stipulant que les filles
doivent �tre appr�t�es de la sorte ?
TN : Pas du tout.� C'est un
business, tous ces gens qui tiennent des stands pour vendre ces robes, et
tous les accessoires qui vont avec.� Nommez quelque-chose vous pouvez
�tre certain qu'il l'ont.� Ils se font une fortune.
NB : Ce que vous dites c'est que c'est
purement commercial, ce n'est pas une des r�gles de la commission d'�tre
v�tu de la sorte ?
TN : Commercial, absolument! La
commission n'a pas de r�gles obligeant les filles � porter tout cet
attirail ou les gar�ons � porter le kilt.
NB : Beaucoup de danseuses ont dans
l'esprit que le fait de porter des robes tr�s color�es, de faire briller
leurs chaussures, de sourire au juge, leur permettra de faire la
diff�rence, leur permettra de gagner.� Qu'en est-il ?� Est-ce
qu'un juge porte vraiment son attention sur ce genre de d�tails ?
TN : Dans une certaine limite. Surtout
le sourire.� C'est important, tous les professeurs disent � leur
�l�ves "souriez". En tant que juge, je peux vous dire que
c'est rafra�chissant de voir quelqu'un sourire. C'est quelque chose que
j'appr�cie beaucoup. A l'�poque, je disais souvent au danseurs,
danseuses de sourire sur sc�ne.� Maintenant je n'en ai plus le
temps, j'ai tellement de comp�titions � juger, il y a tant de danseurs,
je ne sais plus prendre le temps de leur dire ce genre de choses et c'est
dommage.
NB : Vous venez de le dire, vous �tes
souvent juge lors des diff�rentes comp�titions.� Est-ce que, dans
une certaine mesure, ce n'est pas un peu ennuyeux de toujours entendre les
m�mes musiques, les m�mes airs � longueur de journ�e ?
TN : Laissez-moi vous dire une
chose.� D'o� je viens (Limerick), il y a un nombre incalculable de
bons musiciens.� Pas seulement chez moi d'ailleurs, je pense entre
autres � deux musiciens �cossais qui, d'aussi loin que je me souvienne,
ne se sont jamais r�p�t�s.� Ils trouvent toujours une fa�on
diff�rente de jouer un m�me air.� Mais vous avez de ces musiciens,
et je ne citerai pas de noms, qui jouent constamment le m�me Reel, Slip
Jig, ..., encore et encore.� Pour quelqu'un comme moi qui appr�cie
la musique � sa juste valeur, je ne peux m'emp�cher de penser "oh
piti�, mon cerveau !".� C'est vraiment d�primant.��
NB : Quand une danseuse, comme Aoife
Curley par exemple, se place en t�te aux championnats du monde, ann�e
apr�s ann�e, est-ce qu'elle part favorite comme c'est le cas dans la
plupart des disciplines sportives ?� Est-ce qu'on attend d'elle
qu'elle gagne � nouveau ?� Dans un cas comme celui-ci, est-ce que
les juges sont objectifs � 100% au moment de juger quelqu'un qui a d�j�
une bonne renomm�e ou au contraire peuvent-ils �tre influenc�s par un
"nom" ?
TN : Il arrive qu'une danseuse ne gagne
pas la premi�re place chaque ann�e. Vous parlez de Aoife Curley, elle
n'a pas gagn� cette ann�e.� Il se trouve que j'ai eu � la juger au
Championnats 2000 et je lui ai donn� la premi�re place car j'ai ador�
sa performance.� Elle a fait un "set dance" magnifique et
j'ai vraiment eu �norm�ment de plaisir � la regarder danser mais les
deux juges entre lesquels j'�tais assis n'�taient pas de mon avis, l'un
lui a donn� une deuxi�me place et l'autre la troisi�me.
NB :
Qu'est-ce qui fait la diff�rence ? Pourquoi un danseur est-il meilleur
qu'un autre ?� A un niveau aussi �lev� que celui des championnats
du monde, tous sont excellents.� Alors quel est ce petit quelque
chose qui fait que l'un sera le gagnant et l'autre pas ?�
TN : C'est vrai qu'il y a beaucoup de
tr�s bons danseurs et c'est tr�s difficile de les juger. Pour revenir
� Aoife Curley, je l'aime beaucoup, j'ai toujours aim� sa fa�on de
danser mais je me souviens qu'� ses d�buts je ne pouvais objectivement
pas la placer mieux qu'en troisi�me position. Je suis ami avec son
professeur Frances Curley, il est aussi son p�re.� C'est quelqu'un
de bien avec qui je parle de temps en temps et je lui ai confi� que
j'appr�cie �norm�ment la performance de Aoife mais qu'elle a un
d�faut qui m'�nerve �norm�ment : elle ne garde pas les genoux
ensemble, les jambes ne sont pas assez ferm�es, crois�es.� Depuis, elle a
corrig� ce d�faut et j'appr�cie sa danse d'avantage d'ann�e en
ann�e.
NB : Est-ce que les danseurs ne sont jug�s que sur la technique ou est-ce
que le succ�s qu'ils ont sur sc�ne aupr�s du public y est aussi pour
quelque chose ?
TN : La technique.� Ca doit �tre
la technique.� C'est le meilleur danseur qui doit gagner. Le
rythme, la fa�on de bien croiser les jambes, l'�l�vation dans les
sauts, l'attitude corporelle, les bras le long du corps.�Tous
ces petits d�tails. Si vous secouez vos �paules ou vos bras dans tous
les sens, il y aura forc�ment un juge qui vous retirera 10
points.� Oui, c'est la technique. NB
: Vous enseignez depuis 40 ans, on peut donc dire que vous �tes
exp�riment� dans le domaine de la danse irlandaise. Quand un petit
nouveau se pr�sente � votre �cole, est-ce que vous savez d�s les
premiers pas si cet enfant l� � du talent, s'il sera parmi les
meilleurs dans quelques ann�es ?
TN : Non, pas d�s le premier
cours.� En Irlande, les enfants commencent vers 4, 5 ans.�
Vous en voyez un qui a des jambes muscl�es, vous pensez, waouw, un
futur athl�te ! et vous d�couvrez qu'il n'a
pas le moindre sens du rythme.� Vous ne pouvez pas juger sur les
apparences, il faut laisser le temps aux enfants de prouver ce qu'ils
valent. Laissez-leur quelques semaines, quelques mois, et l� je peux
vous dire qui a les qualit�s pour devenir un champion.
[Page
2� -� Photos] |